Beau temps belle mer. jeudi 17 novembre 2011, jour du départ |
Départ du port de La Ciotat |
Il n'y a plus personne sur le quai et cela me va très bien. je suis contente, tout simplement contente. Pas d'euphorie, pas de stress, je ressens un bonheur profond mais sans émotion démesurée. ça y est c'est parti. Pieds nus sur le bitume je pousse le bateau joyeusement et m'installe près de la barre. Tout semble si naturel, qu'il n'y a pas de question à se poser. Les voiles sont hissées et le bateau prend un peu de vitesse..."A l'aventure, Tara Tari!"
sortie du port, entrée dans l'aventure maritime |
Bon temps belle mer. Enfin pétole et mer calme. Et quand il y a un filet d'air, c'est dans le nez. Il y a une vingtaine de milles nautiques entre La Ciotat et Marseille, j'espère faire un meilleur temps que lors de mon Concarneau Lorient. L'idée est de passer entre l'île verte et le Bec de l'Aigle et de progresser ensuite le long des calanques, jusqu'à Marseille. Maxime est à bord pour cette première petite étape. Il nous faudra mille ans (façon de parler) pour arriver à nous extirper de la baie de La Ciotat et passer l'île Verte. Et le soleil éclaire désormais la route qui me mènera vers l'Ouest.
Passer entre l'île verte et le Cap de l'Aigle |
bord vers l'île Verte |
Les lumières dorées sur la pointe rocailleuse de l'île verte, le passage au pied des falaises du Bec de l'Aigle, et Tara Tari devant les calanques! quel spectacle! On ne va pas vite (du tout) mais tant pis!
pointe ouest de l'île verte |
bord vers le Bec de l'Aigle |
Le Cap Canaille se dresse alors devant l'étrave de Tara Tari. Ce cap est, après Slieve League en Irlande, l'une des plus hautes falaises maritimes d'Europe et est la plus haute falaise de France, plus haute encore que les falaises d'Etretat. La Grande Tête du Cap Canaille est haute de 399 mètres au-dessus du niveau de la mer. Bien que la lumière de la fin du jour éclairait de manière un peu rouge cette belle falaise, la roche est par nature un peu rougeâtre, car elle est composée de calcaires détritiques.
Cap Canaille |
... |
cidre breton devant les calanques, rencontre de deux régions |
Il y a 20 milles nautiques entre La Ciotat et Marseille. Je partais sur 10h de mer, mais avec la pétole du départ nous avons finalement mis 15h. Nous avons longé les falaises, et avons laissé l'île Riou à babord (un nom de marin, ça, "Riou") passé le Cap Croisette (bien un truc du Sud, ça, "croisette"!)avant d'entrer dans la rade de Marseille, laissant l'île d'If à babord pour entrer dans le vieux port.
La nuit en mer s'est très bien passée, avec 10 - 15 noeuds, il y a de quoi s'amuser. Malgré la nuit noire, la silouette des Calanques se dessinait grâce à la lumière de la lune et du ciel orangé plus loin, au dessus de Marseille. C'est très impressionnant de voir une côte si sauvage la nuit. Pas une petite loupiotte, rien. Le premier matin du monde. Pas une trace de vie humaine visible. C'est rare. C'est assez grandiose. Je regrettais un peu de passer de nuit devant les Calanques, mais finalement ce passage de nuit est assez fou. Je fais alors le voeu qu'aucun randonneur n'oublie un jour une lampe frontale sur les sentiers, afin qu'en mer, ces falaises restent aussi brutes qu'un bon cidre.
La nuit comme le jour, c'est important de bien observer le décor. Je remarque la lumière orange au dessus de Marseille, les incessants 'va et vient' des avions qui vont et s'en vont de Marseille. cela donne quelques repères. Parfois aussi, cela permet quelques surprises. Alors que je suis de quart, je vérifie sous le vent si tout est bien clair. Tout est clair, pas de bateau. Quelques minutes plus tard, je recommence, vérifie sous le vent. Quand soudain, un feu est là, tout proche! Olala d'où sors-tu voilier-surprise?! Je me concentre, tente de comprendre sa trajectoire, il n'a ni feu vert, ni feu rouge.... C'est bon, j'ai compris. C'est un avion qui fait demi tour, très bas dans le ciel! je souris et reprends mon cap. Cela me fait penser à une anecdote rigolote. C'était il y a deux ans je crois, j'étais en mer avec Philippe Chapel et Jacques Caraës sur le voilier de direction de course de la Solitaire du Figaro, et nous allions de Dingle (Irlande) à Dieppe. J'étais seule sur le pont pour mon quart, et je me souviens avoir bondi, appellant Chacha (Philippe) " Nous sommes en route de collision directe avec un bateau!!!" Chacha a regardé, rigolé de bon coeur en me disant "bon je repars dormir, fais gaffe il y a plein d'autres bateaux dans le ciel!". Selon mes observations nous allions entrer en collision avec une étoile (!). Chacha était redescendu dans sa bannette, mais avant, il avait pris la VHF pour raconter ma crainte sur le canal de course, il n'arrivait plus à arrêter de rire. L'entendre m'a fait bien rigoler aussi, surtout quand en retour, certains figaristes avouaient aussi se bagarrer avec cette étoile d'août qui brille bas sur l'horizon et très fort, et que l'on prend facilement pour un feu de mât. Enfin voilà, quelques souvenirs plus tard, je passe le Cap Croisette.
la lune, que je n'ai jamais pris pour un feu de mât |
Le vent est plus soutenu. Tara Tari file vite vers l'île d'If. La côte ressemble à un immense tapis de braise. C'est la première fois que j'arrive à Marseille par la mer... le chateau d'If et les falaises, c'est absolument superbe. Nous approchons de l'entrée du port, je réveille Maxime et lui confie la barre. Je vais joindre la capitainerie du vieux port, annoncer notre arrivée. Pauvre gardien que je vais réveiller à 4h du matin. Assez vite, un homme arrive en zodiac. Gentil comme tout, il nous escorte, et nous permet de passer la nuit devant la capitainerie du vieux port, où nous nous amarrons.
Première escale. Nous rangeons le bateau, ficelons les voiles, et au dodo!
Bonne nuit Tara Tari!
Capucine
Top ta façon de nous décrire ton aventure Capucine , on a l'impression d'y participer !
RépondreSupprimerC'est dire j'ai le rire de Chacha dans les oreilles depuis que j'ai lu ton anecdote sur la Figaro !!!
Fabrice